MASERATI MC STRADALE
Maserati GranTurismo MC Stradale de faire honneur au championnat MC Trofeo, l’occasion pour nous de l’essayer dans les environs de Modène et du Lac de Garde.
La Maserati Granturismo MC Stradale fut présentée en première mondiale au dernier Salon de l’Automobile de Paris. Elle reprend une philosophie largement éprouvée par Porsche et sa 911, celle de proposer une version plus typée piste d’un modèle de grande diffusion. Chez Maserati, la grande diffusion est une notion toute relative… La GranTurismo n’a jamais été reconnue pour ses talents de pistarde, la faute à son gabarit imposant et à ses 1780 kg. Par conséquent, même s’ils partaient de loin, l’allègement de 110 kg effectué par les ingénieurs de Maserati reste une belle prouesse. Afin d’y parvenir, le régime minceur s’est porté sur la réduction des éléments d’insonorisation qui permettent d’économiser 25 kg, en plus des 16 de la suppression de la banquette arrière, des 26 obtenus des nouveaux sièges baquet à la coque en carbone et des 12 gagnés sur la carrosserie. Même les nouvelles jantes 20 pouces qui profitent d’un large panel de personnalisation (allant de leurs dessins à leurs couleurs) épargnent 5 kg. Extérieurement et intérieurement, c’est entre près de mille combinaisons qu’il est possible de faire son choix, expliquant que chaque exemplaire est construit spécifiquement selon la demande du client. Du coup, prévoyez six mois d’attente jusqu’à la réception de votre bolide. Par exemple, pour les étriers de frein, il existe trois motifs différents. En dehors de cela, la MC Stradale se distingue par une lame noire à l’aérodynamique optimisée, située sous la calandre au trident souligné de rouge, de nouveaux bas de caisse latéraux et des prises d’air incrustées sur le capot avant. Comme sur la version Trofeo, deux ouies sur les flancs ont été rajoutées afin de leur garantir un meilleur refroidissement. Mais c’est l’arrière qui subit le plus de modifications avec les deux échappements centraux repris de la F430 Scuderia, intégrés au pare-chocs totalement redessiné. Pas d’énorme aileron, simplement un becquet intégré au coffre. Le Pack aéro carbone qui recouvre le becquet, les rétroviseurs et les poignées de porte en fibre de carbone est vendu 2.811 €. Si vous rêvez de nos bandes latérales et du trident peint sur le toit, il faudra aussi passer par la case options. Même chose pour la peinture mate facturée 17.940 €.
Sur notre modèle d’essai, l’ambiance intérieure est quelque peu austère à cause de l’omniprésence du noir. Cependant, il y en a pour tous les goûts avec huit autres coloris disponibles. Cuir Poltrona Frau et alcantara trustent l’habitacle. Que ce soient sur la console, les accoudoirs ou les poignées de portes. Le tableau de bord fait peau neuve et tradition oblige, l’horloge à aiguilles est placée au-dessus du système multimédia. Le logo MC Stradale figure lui en bonne place sur la boîte à gants. En options sont disponibles le demi-arceau, les harnais à quatre points, l’extincteur placé derrière le conducteur et le kit course. Ce dernier comprend une combinaison ignifugée, des gants de pilote, un sac assorti et il est même possible de commander un casque Maserati fait pour l’occasion. Loin de l’idée que l’on peut se faire d’un véhicule dévoué à la course, cette GranTurismo est extrêmement accueillante et conserve certaines caractéristiques indispensables à ses marchés cibles, à l'image des deux... porte-gobelets ! Plus sérieusement, il est probable que certains clients auraient aimé se passer de quelques raffinements afin de gagner encore en poids. On pense en particulier au GPS, au demeurant très efficace (c’est suffisamment rare pour être souligné), ou à la climatisation automatique bizone. La chasse aux kilos superflus aurait également pu se poursuivre sur le dépouillement des portes. La suppression des places arrière offre un gain d’espace de rangement non négligeable et bienvenu compte-tenu de la dimension plutôt moyenne du coffre. Trop juste pour quatre occupants, il convient bien mieux au caractère 2+0 de la Maserati MC Stradale.
Pour parfaitement évaluer les talents de ténor de ce moteur, il n’y avait pas meilleur endroit que le berceau du cheval cabré. Et vu comment les chevaux furent éclipsés par notre trident dans les rues de Maranello, nous ne nous étions pas trompés ! Le levier de vitesse laisse sa place à deux boutons : 1 pour la marche avant et R pour la marche arrière, complétés par des palettes au volant qui ont en leur faveur deux qualités : celles d’être immenses et fixes. En restant les doigts agrippés à celle de gauche, les rapports descendent à la volée. Jeu, set et match. A chaque changement de vitesse, ça gueule et la caisse vibre de partout. Les rétrogradages en rafale dresseraient les poils au plus imberbe des hommes. A la manière de Lucky Luke, la boîte MC-Shift dégaine plus vite que son ombre et les changements de rapports déchirent l'air comme des balles de revolver. On trouverait presque que le rupteur intervient trop tôt, à 7600 trs/min. La démonstration est faite qu’il est encore possible de vivre sans suralimentation ni injection directe, ni boîte double-embrayage ! Mais pour combien de temps encore ? La vitesse maximale est annoncée à 301 km/h, chiffre que nous n’avons évidemment pas vérifié. Quant au 0 à 100 km/h, il est abattu en 4,6 secondes, confirmant ce que l’on craignait, un excès de masse à tracter.
De notre côté, nous avons établi une moyenne de 17 litres, ce qui au vu de notre rythme de conduite très "italien", du poids et de la puissance, n’est pas si mal. La principale nouveauté de la Stradale se situe dans sa transmission, ni plus ni moins héritée des F430 Scuderia et 16M. Rien que ça... Si vous connaissez vos classiques, vous êtes au courant qu’il ne s’agit donc pas d’une boîte à double embrayage, trop souvent synonyme de sensations lissées, mais bien d'une vraie séquentielle "à l'ancienne", comme on peut désormais le dire. Appelée ici MC-Shift, la boîte F1 Ferrari aussi brutale que véloce expédie les rapports en 60 ms. C'est l’une des plus rapides du monde, derrière celles de la Ferrari 599 GTO et de la Lamborghini Aventador. Petite subtilité, ces temps sont réalisés en mode Race, activable une fois l’huile à bonne température. En mode Sport, il faut compter 100 ms et 240 en Auto. Ce qui nous intéresse le plus est le MC-Race. Ce mode joue aussi sur l’ouverture de la soupape de dérivation (by-pass) de l’échappement, ouverte en permanence dans ce mode ultra sportif et à partir de 4000 dans celui intermédiaire. Cette nouvelle ligne d’échappement libérée économise par la même occasion 6 kg sur la balance. La sonorité - pourtant déjà exceptionnelle ! - tourne alors au divin. On obtient une sorte de mix entre les V8 AMG et Ferrari, ou en language mélomane un savant mélange de Metallica et de Pavarotti ! Le résultat obtenu dépasse l’entendement et ce bloc délivre un des sons les plus jouissifs qu’il m’ait jamais été permis d’entendre. Il vous prend aux tripes, à tel point que j’en ai rêvé toute la nuit.
Basée sur la Quattroporte V, la Maserati GranTurismo est un coupé très imposant. On peut même dire trop pour une stricte deux places comme est configurée la MC Stradale. Avec l’assiette abaissée de 10 mm, on est assis relativement bas, la position de conduite est bien pensée et le volant a la taille qu’il faut, au millimètre près. On n’a pas encore commencé à rouler qu’on se sent déjà bien ! Cette tendance se confirme au bout des premiers kilomètres en ville où on aurait pourtant pu craindre le pire. Aucune difficulté pour manier la bête malgré son côté paquebot. La Stradale n'a rien d'une citadine mais elle braque plutôt bien. On se familiarise immédiatement au mode de fonctionnement du monstre qui est de façon surprenante très civilisé en mode Auto. Les premières aspérités de la chaussée se passent sans le moindre encombre. La rigidité annoncée en hausse de 16% à l’avant et 32 à l’arrière n’est pas qu'un argument technique sans intérêt mais c’est la suppression de la suspension pilotée Skyhook qui nous a le plus bluffé. Elle, pourtant si utile sur les GranTurismo et Quattroporte, a été éconduite pour gagner encore quelques kilos. En contrepartie, les suspensions ont été revues et les amortisseurs durcis de 8%. Pour une répartition des masses optimale (48/52), la boîte est montée à l’arrière.
Maserati a toujours cultivé une certaine différence par rapport aux autres constructeurs. Ce fut d’abord le cas avec ses 6 cylindres et V8, là où ses rivaux italiens carburaient aux 12 cylindres, avant de se distinguer une nouvelle fois au début des années 80 avec le premier V6 bi-turbo de série. Maintenant que cette technologie est répandue en masse, Maserati nous propose avec un V8... atmosphérique ! Pas la peine de tourner autour du pot, le V8 Maserati - de conception Ferrari - fait partie de nos chouchous. Ce n’est peut-être pas le moteur le plus poussé sur le marché mais il possède un caractère réellement exceptionnel. Ce joli bébé de 190 kg à distribution par chaîne fait partie de la famille lancée sur la Maserati 4200 GT et poursuivie chez Ferrari dans les F430. Arrivé ensuite sous le capot de l’Alfa Romeo 8C-Competizione dans une cylindrée plus généreuse, celle-ci fût reprise chez Maserati pour faire le bonheur des Quattroporte S et GranTurismo S.
Pour la marque de Modène, le haut moteur est spécifique. Le gain de la MC Stradale par rapport à la GranTurismo S est de seulement 10 chevaux et 20 Nm tandis que la courbe de couple évolue pour plus de répondant à bas-régime. Résultat, 80% des 510 Nm sont disponibles à 2500 tours grâce aux arbres à cames équipés d’un variateur de phase continu. Bien que la puissance soit de 450 ch comme sur les 8C, il ne s’agit pas exactement de la même motorisation, les deux Alfa délivrant moins de couple. On aurait aimé que le cap fatidique des 100 ch/l soit franchi, pour la forme, mais ce détail s’oublie très rapidement une fois le volant en main. Le gain de puissance s’est fait sur la nouvelle conception de la dynamique de fluide dans le carter et l’utilisation du revêtement DLC sur les poussoirs et lobes de l’arbre à came. La friction est ainsi réduite, ce qui a bénéficié par la même occasion à la consommation, annoncée en baisse de 14%. Difficile à vérifier tant le V8 Maserati est un pousse-au-crime permanent.
Passage à la vitesse supérieure avec le bouton Sport et hausse du rythme. Les premiers virages se négocient à vitesse élevée sans prise importante de roulis grâce aux nouvelles barres qui gagnent un centimètre à l’avant et 2 à l’arrière. Il y a bien un peu de sous-virage mais rien de rédhibitoire. L’arrière ne se dérobe pas, la tenue de cap étant assurée par le long empattement. Nous avions été briefés sur le mode Race, promis comme étant beaucoup plus permissif grâce notamment aux assistances retardées au maximum. Bien entendu, elles sont déconnectables. Mieux vaut bien choisir son moment de remise de gaz en sortie de virage, à moins d’avoir envie de s’essayer au drift. On retrouve dans cette configuration une vraie Maserati, c’est-à-dire un véhicule plus axé sur le fun que sur l’efficacité pure. Quitte à se faire peur, surtout si on prend trop la confiance. A contrario, si on maîtrise un peu son affaire, les dérives du train arrière se rattrapent facilement et c’est bien là le principal. Pirelli a été mis à contribution pour la conception de nouveaux pneus pour canaliser les ardeurs de la belle. Ainsi, les Pzero Corsa sont plus larges que sur la GranTurismo S. Malgré les 295 mm de large à l’arrière, la fougue de l’italienne prend le dessus. L’aérodynamique revue en profondeur a permis une augmentation de 25% de la portance à l’avant, et le double à l’arrière. Dans les faits, à (très) haute vitesse, un manque de stabilité de la caisse se fait encore sensiblement ressentir et les freinages intensifs ne sont pas des plus sécurisants. Dommage car avec les nouveaux freins carbo-céramique à six pistons à l’avant et quatre à l’arrière, qui épargnent à eux seuls 18 kg, on s’attendait à mieux. Un fessier baladeur caractérise la GranTurismo lors des gros freinages. S’il fallait résumer en une phrase, le plaisir pris est tel que les défauts relevés sont rapidement oubliés…
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